Chu de che / Je suis d'ici / Sono di qui / Ich bin von hier ! Notre liberté ne nous a pas été donnée, mais combattue et priée par nos ancêtres plus d'une fois! Aujourd'hui, comme autrefois, notre existence en tant que peuple libre dépend du fait que nous nous battions pour cela chaque jour. Restez inébranlable et soyez un gardien de la patrie pour que nous puissions remettre une Suisse libre telle que nous la connaissions à la génération suivante. Nous n'avons qu'une seule patrie!

vendredi 6 août 2010

Le feu

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Tous les peuples ont spéculé à travers leurs mythes sur la "domestication" du feu (On trouvera un bonne description de ces mythes dans l'ouvrage de Frazer, “ le rameau d'or ” ) : emprunts aux volcans, aux incendies provoqués par la foudre, flamme volée aux Dieux par un héros civilisateur, quelquefois au prix de son propre sacrifice, comme le héros grec Prométhée. Le moment de la première utilisation du feu puis sa maîtrise sont des questions importantes pour le préhistorien. Les éléments de réponses sont malheureusement encore très pauvres mais la plupart des préhistoriens s'accordent pour penser que le feu est utilisé depuis 250 000 ans/300 000 ans.

Les techniques utilisées se ramènent toujours à deux principes physiques. Les systèmes par percussion (acier contre silex ou silex contre marcassite) et ceux par friction de deux morceaux de bois (par sciage, rainurage, giration). Très tôt ces systèmes ont été recensés par les ethnographes mais beaucoup plus rarement essayés. Les préhistoriens et les ethnologues se sont souvent contentés de reproduire, en toute bonne foi, sans les critiquer, beaucoup d'assertions erronées puisées dans la littérature de leurs prédécesseurs.

L'expérimentation critique devenue habituelle en préhistoire et en archéologie est plus inhabituelle en ethnologie. Par ce moyen ont été clarifiées certaines imprécisions. Nous établirons ici un bilan sur nos connaissances sur l'obtention du feu "avant les allumettes" (Collina-Girard, 1998). Ce champ de recherches concerne la préhistoire mais aussi l'histoire, l'histoire des techniques et l'ethnographie. Il concerne aussi notre folklore puisque ces techniques et les traditions qui leurs sont attachées n'ont disparues en Europe qu'à la fin du XIXè siècle.

- A : La première utilisation du feu

En Europe, la grotte de l'Escale, dans la vallée de la Durance, fouillée par E.Bonifay, a fourni une faune archaïque, quelques éclats, et des lentilles cendreuses, témoins possibles, vers 600 000 des plus anciens feux allumés d'Europe (l'hypothèse de l'incendie de foret naturel n'est pas encore à exclure). A Nice, les silex brûlés de Terra Amata ont été datés de 380 000 ans. Les foyers comportent charbons et cercles de galets. Contradictoirement la grotte de Tautavel, vers 400 000 ans n'a fourni aucun témoignage de feu. Vers 350 000/400 000 ans celle de Lunel-Viel dans le département de l'Hérault à livré d'indiscutables foyers aménagés.

La plupart des sites en Europe prouvent une maîtrise parfaite du feu vers 250 000-300 000 ans. Les archéologues y observent en effet, des foyers indubitables (charbons, niveaux cendreux, pierres rougies et ossements partiellement carbonisés).

Ces foyers parfaitement "structurés" (cercles de galets, feux allumés dans des cuvettes) indiquent une bonne connaissance des moyens d'améliorer combustion et tirage


l'invention du feu telle qu'on l'imaginait au XIX° siècle © (Figuier, 1870)


Nous n'avons actuellement aucun moyen de savoir si ces hominidés savaient fabriquer le feu car aucun vestige d'outil a fabriquer le feu n'a été trouvé. L'hypothèse du feu ramassé, conservé et transporté n'est pas a exclure comme l'imaginait déjà J.H.Rosny-Ainé dans son célèbre roman : "la guerre du feu". La conservation du feu a, en effet, été pratiquée à toutes époques.

Au XIX° siècle dans les villages on préférait encore, quand le feu de la maisonnée s'éteignait, emprunter un tison au voisin plutôt que de le rallumer. Le roman d'Eugène Le Roy, "Jacquou le croquant" en témoigne pour le Périgord de la fin du siècle dernier et beaucoup plus loin de nous les indiens navigateurs de Patagonie transportaient dans leur pirogues une foyer allumé en permanence sur un lit d'argile. Pour leur part, paraît t-il, les bergers grecs transportaient le feu en le communiquant à la moelle d'une grande ombellifère, la férule.... C'est le moyen utilisé par le héros Prométhée pour voler le feu aux Dieux comme l'indiquent les textes classiques d'Hésiode et d'Eschyle. Encore plus en arrière dans le temps, au chalcolithique, l'homme miraculeusement conservé avec son équipement dans les Alpes Autrichiennes (daté entre 3350 et 3100 B.C) avait sur lui un récipient en écorce de bouleau contenant des feuilles d'érables et quelques charbons. L'hypothèse a été émise que cette boîte servait au transport de tisons évitant d'avoir à rallumer du feu.

Pour l'instant aucune trace de feux intentionnels au delà de 500 000 ans n'est certaine même si certains préhistoriens pensent que la connaissance du feu remonte au dela de 1 MA. Les arguments archéologiques, sont généralement jugés insuffisants pour soutenir cette thèse tout a fait envisageable. Des incendies de forêts spontanés sont peut être, plus simplement, à l'origine, des argiles recuites et des pierres brûlées décrites dans certains sites africains. On ne peut donc affirmer, pour l'instant, que australopithecus ou homo habilis connaissait l'usage du feu .

- B : Histoire des briquets

Les plus anciens briquets datent de l'age du Fer, ils sont assez fréquents à l'époque romaine et gallo-romaine. En Bulgarie on connaît d'impressionnantes séries qui proviennent de sites du IX° et X° siècle et leur forme, celle du "coup de poing américain", ne varie guère jusqu'au XIX° siècle.

© Briquet dit "à amadou" du début du XXème siècle (cliché : B. Roussel).


Les briquets historiques constituent par eux même un objet de recherche qui concerne l'histoire des techniques, l'histoire de l'art et l'ethnographie. Ces objets intéressent de plus en plus certains historiens et archéologues. Certains briquets asiatiques népalais ou tibétains sont souvent de véritables objets d'art incrustés d'argent et richement ornée de perles de corail et de turquoises. Dans ce cas la lame d'acier du briquet est fixée à une pochette en cuir contenant pierre à fusil et amadou. En Europe ces objets utilitaires ont inspiré la créativité des artistes de toutes périodes.
Les briquets à silex, encore utilisés dans certaines régions isolées d'Afrique ou d'Asie servaient encore très recemment en Europe. Il y a une cinquantaine d'année on les trouvait encore sur les marchés de Grèce et de Bulgarie et ils faisaient; à la même époque, partie de l'équipement des bergers isolés en montagne.

En France ces objets de la vie courante ont rapidement oubliés en une ou deux générations depuis l'entre-deux guerres. Le dos d'une lame de couteau en acier non inoxydable frappé sur un éclat de silex peut constituer un briquet opportuniste : c'était une des manières des paysans pauvres du Périgord du XIX° siècle pour allumer le feu. Au Sahara ce sont souvent des haches polies récupérées sur les sites néolithiques qui, occasionnellement servent de pierre à briquet. Au Zaïre ils sont encore fabriqués avec de vielles limes mises au rebut.

Des études en cours de métallurgie expérimentale montrent que les meilleurs aciers sont des aciers nitrurés, ce qui explique l'ajout par les forgerons de matières organiques aux aciers des briquets : corne ou urine.

- C : Les briquets préhistoriques à marcassite

A l'époque préhistorique, avant le métal, on frappait le silex sur un morceau de pyrite ou de marcassite (sulfures naturel de fer de formule Fe S2 cristallisant respectivement dans le système cubique et dans le système orthorhombique). Marcassite ou pyrite sont nécessaires puisque, contrairement à un a-priori très général, le choc de deux silex ne produit qu'une étincelle froide et donc inefficace. C'est en tout cas l'opinion unanime de tous les expérimentateurs.

Nodules de marcassite, © Photo Jacques Collina-Girard


La marcassite se présente en nodules fibroradiés jaunes métallique avec des nuance verdâtre. Elle est un peu plus tendre que la pyrite dont l'éclat doré est plus franc, moins adaptée à l'obtention du feu. Les étincelles produites par le choc du silex contre la marcassite (ou de la marcassite contre la marcassite) persistent longtemps, certainement à cause de la présence de soufre (odeur). La marcassite est fréquente dans certaines régions en particulier dans les terrains crayeux du nord de la France.

Des briquets archéologiques, comportant nodule de marcassite et grattoirs en silex ont été retrouvés prouvant, de façon certaine, la connaissance de cette technique par les hommes de la deuxième partie du Paléolithique supérieur européen. Au “ Trou de Chaleux ”, en Belgique, un nodule de marcassite, fortement rainuré par un usage prolongé remonte à 13 000 ans : il serait l'un des plus ancien vestige de ces briquets paléolithiques.

L'homme chalcolithique miraculeusement conservé avec son équipement dans un glacier des Alpes Autrichiennes portait un morceau de pyrite et un champignon. L'amadou, conservé dans des sites archéologiques proches de marécages ou de lacs, est attesté dès le Mésolithique (Site de Starr Car en Angleterre) et plus fréquemment au néolithique en contexte lacustre. Cette technique était encore pratiquée par les indiens de Patagonie, par percussion d'un éclat de quartzite contre un nodule de marcassite.

Amadouvier © Copyright C.L. Masson


Plusieurs chercheurs se sont attachés à la mise en évidence de stigmates d'utilisations sur les briquets expérimentaux et archéologiques. Pour les périodes historiques les archéologues n'ont pour l'instant guère attaché d'attention aux éclats de silex associés aux sépultures : il s'agit certainement d'éléments de briquet dont l'étude systématique serait à entreprendre.

- D : Principe du briquet

Les briquets historiques et actuels sont maintenant bien connus tant sur le plan de leur utilisation que sur celui de leur fabrication. Dans les briquets préhistoriques comme dans les briquets historiques le principe demeure identique : une particule d'acier ou de marcassite arrachée par le choc du silex brûle et tombe sur un produit inflammable.L'expérimentation montre que les briquets préhistoriques à marcassite produisent des étincelles plus efficaces que ceux à acier. Le soufre contenu dans le minerai ( sulfure de fer) améliore, de façon évidente, les propriétés incendiaires de l'étincelle. Tous les expérimentateurs ont noté que la marcassite (orthorhombique) moins dure que la pyrite (cubique) est bien préférable. Certains doutent même que la pyrite (au sens strict) soit utilisable : de nouvelles expérimentations systématiques seront nécessaires pour préciser ce point particulier. Il faut aussi noter que les archéologues confondent souvent les deux formes, d'ailleurs minéralogiquement très voisines, pyrite et marcassite.

- E : La fascination du feu



La production du feu exerce sur tous une fascination irrationnelle et générale qui a sans doute fonctionné dès les premiers ages de l'humanité. Sans doute y a t'il là une voie de recherche psychologique et psychanalytique pour comprendre de l'intérieur la maitrise du feu et de sa production comme l'on déjà esquissé Freud puis Bachelard.

- F : Technique et symbolique

En Europe on connaissait l'allumage du feu par friction jusqu'au XIX° pour des fêtes ou des cérémonies curatives païennes. Partout l'allumage du feu par friction a été ritualisé et sexualisé. De nombreux mythes d'origine du feu, en Asie du Sud-Est et dans le Pacifique occidental, font apparaître une certaine compétition, voire une rivalité ou une coopération entre les hommes et les femmes qui guettaient cette nouveauté. L'exemple des paysans arakanais du Pakistan oriental, cité par Bernot,est particulièrement illustratif de cette sexualisation puisque hommes et femmes utilisent spécifiquement des procédés différents : lanière et bambou pour les hommes et friction de deux bambous pour les hommes. L'homme incapable de faire du feu par friction est raillé et considéré, ce n'est qu'une plaisanterie, comme incapable de se marier mis les mêmes moqueries ne s'appliquent pas aux femmes incapables de produire du feu.

- G : Fantasme et distorsion des observations scientifiques

L'interprétation des techniques d'allumages du feu semble pendant longtemps être prise dans une logique totalement étrangère à la technique puisque deux éléments de qualités différentes et opposés étaient présentés comme necessaires. Le thème du bois dur et du bois tendre court depuis fort longtemps comme une rumeur sur la production du feu par friction. Pourtant l'expérimentation démontre que cette rumeur est techniquement infondée. Si elle persiste en dépit de la réalité c'est qu'elle s'appuye sur l'évidence d'une autre logique, celle du fantasme, ou le feu assimilé a l'amour est lié à l'acte sexuel. Cette représentation de la technique aboutit tout naturellement à parler de bois mâles et de bois femelles avec tous les avatars symboliques de cette sexualisation dont l'opposition du dur et du tendre. Cette interprétation se retrouve dès l'antiquité dans les textes de Théophraste qui préconise un bois dur et un bois tendre en se contredisant quelques lignes plus loin a ce sujet en disant que finalement cela n'a pas d'importance et que l'on peut prendre deux essences de même nature. Cette assertion qui se retrouve ensuite chez Pline l'Ancien persiste jusqu'a nos jours dans les écrits des préhistoriens et des ethnographes et propagées par les récits de voyages et les romanciers. Il semble que cette assertion soit meilleure à penser que celle des contraintes techniques et lors de démonstration d'allumage du feu cette interprétation surgit spontanément du public captivé.

Cette bipolarisation de la pensée suivant l'opposition mâle/femelle semble par ailleurs fondamentale, peut être est t'elle structurellement liée au développement de "l'appareil psychique'" suivant une construction permanente ou l'illusion d''un plein subjectif permet au sujet de fuir un creux subjectif assimilé à sa propre mort. Sur le plan de la biologie la vie pourrait être considérée comme une fuite devant la mort le problème c'est que ce mécanisme semble fonctionner aussi sur le plan psychique ou la vie mentale semble se construire comme un édifice destiné à conjurer pour la conscience de soi son propre vide ?

L'exemple des techniques du feu montre donc que l'étude des techniques et le problème de leur apparition dépasse de beaucoup leur aspect pratique et utilitaires puisqu'elles font système avec tous les autres aspects de la vie psychologique et sociale : il s'agit d'une réalité bien connue des ethnologues) mais souvent sous-estimée par les préhistoriens qui ne peuvent baser leur interprétation que sur la logique la plus évidente des objets matériels.

Le foret à archet vu par un artiste du XIX°, Daux, 1877


Comme l'ethnographie nous l'a montré la friction bois contre bois permet d'obtenir du feu. La rotation d'un foret vertical sur une planchette horizontale est le système le plus fréquemment utilisé. Une petite encoche de la planchette à l'endroit ou s'appuie le foret évacue et aère la sciure. La friction produit de la chaleur qui enflamme les agglomérats finement fibreux accumulés dans l'encoche. Cette braise peut ensuite amorcer un feu de feuilles sèches ou autres produits végétaux très inflammables.




Foret à pompe, Madagascar, détail, Collection A.Barrio de Souza © Photo Jacques Collina-Girard


La nécessité d'utiliser deux bois de duretés différentes n'est qu'une légende dont la ténacité est sans doute ancrée dans les codes classificatoires spontanés (l'opposition significative mâle/femelle) communs à toute l'humanité (Collina-Girard, 1998). La reproduction expérimentale montre en effet contradictoirement que deux essences identiques fonctionnent tout aussi bien et il vaut mieux que les bois soient tendres pour économiser les efforts. Les meilleurs bois sont de texture finement fibreuse et donnent une sciure finement cohérente particulièrement inflammable (lierre, saule, tilleul, laurier ...etc.).

L'utilisation d'un archet (indiens nord-américains, inuits, aborigènes australien pour faire tourner le foret permet d'obtenir une braise en une vingtaine de secondes (une ou deux minutes pour une rotation manuelle directe). L'utilisation de l'archet dérive certainement du procédé à la ficelle, une corde mue par deux personnes entraînant alors la drille. L'archet rendant inutile la seconde personne.

Foret à pompe, Madagascar, détail, Collection A.Barrio de Souza © Photo Jacques Collina-Girard



Une autre amélioration possible est l'utilisation du foret à pompe surtout utilisé pour percer mais qui a servi aux indiens iroquois à allumer le feu. A Taroudant au Maroc ce système, lesté d'une boule de stéatite servait pour travailler artisanalement ce matériaux il n'y a pas si longtemps (observation personnelle). On le retrouve réemployé à Madagascar pour la production du feu.





Le foret à arc © dessin A.Fournier


La mise en rotation manuelle du foret a été souvent reproduite, le procédé un peu plus pénible fonctionnant plus facilement avec deux personnes. Nos deux collègues de Montpellier, Paul Boutié et Iannis Mannos utilisent une drille à feu à pointe amovible en bois de sureau (choisi sur des branchettes avec le moins de moelle possible) sur une planchette en lierre. ils obtiennent le feu en une ou deux minutes en moyenne.

La régularité de la rotation est importante mais autorise l'interruption du mouvement nécessaire pour la remontée de la main le long de la baguette. Pratique et force physique constituent des atouts si l'on fait le choix de cette technique manuelle qui est aussi la plus répandue car la plus simple.

Foret à feu, populations Massaï, Kenya, © Collection et Photo J.Ph.Brugal


En Europe orientale, au XIX° siècle on utilisait , pour produire le "feu nouveau" deux bâtons de tilleul actionné par un garçon et une fille. L'expérimentation montre bien la raison technologique du choix de ce bois, tendre et très léger produisant une sciure fine très inflammable. Le choix de personnes de sexes opposés renvoie à une symbolique très partagée assimilant la production du feu à un acte sexuel ritualisé.



Scie à feu, îles du Pacifique © Photo C.Rolando


Il existe des procédés autre comme le sciage d'un demi bambou contre un autre demi-bambou pratiqué dans le sud-est asiatique. I.Mannos et Paul Boutié nous ont récemment démontré (octobre 1996) l'efficacité et la rapidité du procédé (deux personnes tenant la "scie" et une autre maintenant la pièce fixe) : la scie entaille et traverse la convexité du bambou fixé au sol et la sciure tombe au dessous jusqu'à l'obtention d'une braise. On a également régulièrement décrit le procédé classique du sciage d'un bambou par une lanière (liane) en Papouasie nouvelle Guinée. Un autre procédé est celui du rainurage d'une planchette par une baguette (hibiscus tiliaceus) habituel dans les îles du Pacifique. On en trouvera une excellente description dans le roman "Taïpi" de H.Melville (l'auteur bien connu du roman : Moby Dick). Sur le fond, tous ces procédés reposent sur le même principe physique : la chaleur produite par le frottement enflamme une sciure très fine issue de l'usure de deux bois botaniquement choisis.

Archéologiquement ces objets en bois, ne sont qu'exceptionnellement conservés. Les traces les plus anciennes de planchettes et de forets à feu proviennent pour l'instant de la grotte de Guitarerro dans les Andes Péruviennes (10000 B.P.)


Les plus anciennnes planchettes et forets à feu archéologiques, Grotte de Guitarerro, Perou, d'après Lynch, © Dessin Jacques Collina-Girard


On en connaît peut être dans le matériel néolithique des lacs suisses et le site de l'Age du fer de Toro au Japon en a fourni de très nombreux exemplaires. On peut , sans en avoir encore la preuve directe, supposer que ce système était connu des homo sapiens du Paléolithique supérieur.

En France on a "battu le briquet" jusqu'à la guerre de 1914-1918 comme l'atteste ce témoignage d'un certain Deherrypon, de la vie quotidienne dans la Hollande de la fin du XIX° siècle :
"Sur la tablette de la cheminée de notre cuisine, on remarquait, il nous semble la voir encore, une boîte ronde en fer blanc, bosselée, mal entretenue, pas très propre ; et c'est précisément cette dernière particularité qui la faisait remarquer, car son négligé jurait au milieu des splendeurs de propreté d'une cuisine flamande. Cette boîte était munie d'un couvercle à frottement qui la fermait hermétiquement, et lorsqu'on avait soulevé ledit couvercle, on avait sous les yeux deux objets significatifs : une pierre à fusil et un briquet ; mais où donc était l'amadou ?



Production du feu grâce à un briquet en acier © Photo B. Roussel


En y mettant un peu plus d'attention, on s'apercevait bientôt que le rond visible de la boîte était un disque, également en fer blanc, qui était mobile et recouvrait les chiffons brûlés auxquels il servait d'étouffoir. Le briquet était donc complet ; mais la question était de savoir en tirer du feu. Pour cela, il fallait d'abord prendre une chaise et s'asseoir.

On fixait ensuite solidement la boîte entre les deux genoux, comme on fait d'un moulin à café ; on serrait fortement entre le pouce et l'index replié de la main gauche, la pierre à fusil, dont on ne laissait, pour plus de solidité, dépasser que strictement le nécessaire ; et enfin, de la main droite, on saisissait le briquet ; les préparatifs étant alors terminés, on consacrait quelques secondes à examiner si toutes les choses étaient en règle, et à prendre sur la chaise, une solide assiette. L'instant critique était arrivé.

On introduisait la pierre à fusil et conséquemment une bonne partie de la main gauche dans la boîte, afin de rapprocher, autant que possible, la pierre et les cendres de chiffon ; et l'on frappait un premier coup de briquet dont on n'espérait pas grand-chose ; il n'avait pour objet que de prendre la mesure des coups ultérieurs. Puis un second coup, sérieux, celui-là, un troisième... rien !... un quatrième... aïe ! (on a frappé sur son pouce)..., un cinquième ...! un sixième ... ah ! une étincelle !...un septième... autre étincelle qui semble vouloir se fixer sur les chiffons, mais qui s'éteint !... un huitième... un dixième..un quinzième...enfin ! une bienheureuse étincelle s'est accrochée aux chiffons ; on aperçoit, à leur surface un tout petit point en ignition ! Vite on lâchait pierre et briquet, et, le nez dans la boîte, on soufflait, on soufflait jusqu'à ce que le soufre d'une allumette de chanvre pût être enflammé. Ouf ! la chandelle était allumée.

Allumage d'un brin d'amadou au briquet à marcassite,© Photo Berthoumieux - J.Collina-Girard

Cette opération, pénible en plein jour, devenait interminable dans l'obscurité ! Nous nous souvenons que pendant l'hiver, Mitje, notre vieille servante, devait quitter son lit ne demi-heure plus tôt que d'habitude, en raison du temps supplémentaire qui lui était indispensable pour allumer, dans les ténèbres, le feu nécessaire à la confection du café. De notre lit, nous entendions la pauvre vieille chercher à tâtons, cette maudite boîte d'abord, et sa chaise ensuite ; puis se démener comme un diable avec la pierre et le briquet. Il arrivait parfois que la pierre ou le briquet lui échappa des mains ; il fallait entendre, alors, l'avalanche d'imprécations flamandes que Mitje adressait à la boîte, au briquet, au café, à la terre entière, pendant que, rampant à quatre pattes, elle fouillait les ténèbres pour y retrouver l'inconscient auteur de toutes ces fureurs. Concevons qu'il y avait lieu d'envier le sort du sauvage avec ses deux morceaux de bois."

Le principe de ces procédés est que le choc du silex (ou "pierre à feu") arrache une particule incandescente à l'acier du "briquet" (ou "fusil"). Cette étincelle est alors reçue sur une substance inflammable. A cet effet divers produits sont utilisables, les plus classiques étant l'amadou et la toile carbonisée (étoupe).

Le vrai amadou, est un excellent produit tiré d'un champignon ligneux parasite des vieux troncs. Le coeur du champignon, sous une couche fibreuse et incombustible est composé d'une substance ouatée et orangée. Cette substance est parfaitement apte à recueillir des étincelles.
Les amadous traités à l'ère industrielle par une imprégnation aux nitrates subissaient dans les campagnes des traitements plus artisanaux parfaitement accessibles à l'homme préhistorique.

L'ébullition dans des lessives de cendres suivie d'une imprégnation par le suint de la laine de mouton (riche en potassium) est pratiquée en Bulgarie. L'ébullition prolongée dans un mélange d'eau et de suie était habituelle en Sibérie. En Grèce on faisait macérer le champignon dans l'eau riche en tanin qui stagne à la fourche des vieux arbres.

Des usages plus inattendus de ce champignon on été notés. En Roumanie il servait à fabriquer, par feutrage, couvre-chefs et vêtements et cet artisanat, qui serait originaire de Hongrie perdure actuellement dans la région de Brasov. En pharmacie ce produit était partout vendu comme hémostatique. Certains polypores jouiraient, en plus, de propriétés antiseptiques

Les restes archéologiques de briquets remontent en Europe au Paléolithique supérieur. Il s'agit toujours de nodules de marcassite associés à des lames-briquets en silex. L'invention de ce procédé paraît, à priori, plus facile que celle du procédé par friction (étincelles produites fortuitement lors de la taille du silex par un percuteur de marcassite).

On a souvent pensé que le procédé le plus anciennement pratiqué serait effectivement celui par percussion actuellement pratiqué par les populations encore qualifiées au début du siècle "d'arriérées" : Fuégiens, Esquimaux, Aléoutes, et Kadirs de l'Inde méridionale.

En Amérique du sud les indiens alakalufs n'utilisaient pas la drille à feu mais se servaient exclusivement de nodules de marcassite, ramassée dans une seule île de l'archipel patagonien. On suggère parfois, sur des observations faites dans ces régions, et aussi au Paraguay, chez les indiens guayakis, que le procédé par percussion a été le premier utilisé par les indiens de l'Amérique du sud. La drille a feu l'aurait ensuite supplanté.

Un peu plus au nord, le foret a feu est pourtant représenté dès 10 000 B.P. par les indiscutables drilles et planchettes à feu de la grotte de Guitarrero au Pérou. Dans le nord-ouest de l'Argentine il est partout attesté depuis la période des chasseurs collecteurs jusqu'à celle des agriculteurs-céramistes. En pays andins la rareté des bois disponibles a conduit les précolombiens à utiliser systématiquement certaines pièces d'attelage des lamas comme pièce passive pour produire du feu.

Au vue du peu de vestiges actuellement connus et du caractère extrêmement périssable des briquets à friction mieux vaut pour l'instant mesurer notre réelle ignorance sur la nature du procédé le plus anciennement inventé même si, en Europe les briquets les plus anciens actuellement retrouvés (en Belgique dans le Paléolithique supérieur) sont des briquets à marcassite.

Nous décrirons en premier lieu l'appareil et ses constituants puis les étapes de son fonctionnement Le foret et la planchette sont les deux éléments principaux du dispositif. La corde de l'archet assure l'entraînement.

A - Le foret

Il s'agit d'un bâton, de section arrondie dont les deux extrémités sont appointées. Ses dimensions sont très variables. mais ceux que nous utilisons ont une longueur comprise entre vingt et quarante centimètres avec un diamètre compris entre un et deux centimètres. Un foret de petit diamètre tournera plus vite mais développera moins de puissance qu'un foret de fort diamètre. Il s'agira donc de trouver un compromis avantageux (entre un et deux centimètres suivant le bois). La longueur du foret joue aussi un rôle. Cela influe sur le temps d'utilisation car un foret long sert plus longtemps ce qui est commode pour des bois mous qui s'usent très vite. Cette longueur ne peut pas croître indéfiniment car si le foret trop long et trop fin sa rigidité diminue et il vibre de façon gênante. La pratique nous à montré ,de façon empirique, que la longueur optimale avoisine 25 centimètres. En dessous de dix centimètres l'opération est possible mais pénible car il devient très difficile de maintenir le foret en place et de l'empêcher d'être éjecté de la planchette.. L'extrémité supérieure du foret doit être taillée en pointe pour limiter au maximum les forces de frottement. Il faut la retailler de temps en temps, mais pas trop pour qu'elle ne s'écrase pas au contact de la paumelle.

Appointer l'extrémité inférieure est aussi important mais pour des raisons exactement inverses car, en début d' installation, la pointe du foret ne doit pas glisser. Par la suite, quand le foret est correctement ajusté dans le trou d'amorçage qui vient de se creuser,les risques de dérapages se réduisent.

B - La planchette

On peut prélever cette pièce de bois dans une branche de deux centimètres de diamètre, fendue dans le sens de la longueur ou utiliser une planchette de 1 à 1,5 cm d'épaisseur. L'opération suivante consiste à découper une encoche triangulaire sur le bord de la planchette (un centimètre à un centimètre et demi de profondeur sur autant de largeur). C'est là que viendra se déverser la sciure qui sera ainsi efficacement aérée Il faut ensuite creuser un tout petit trou à la pointe de l'encoche là où viendra s'appuyer le fuseau qui ne doit ni glisser, ni déraper, ce qui peut arriver en début de rotation. L'ajustement forcé du fuseau sur la planchette réduit ensuite de plus en plus ce risque.

Remarque 1 : l'épaisseur de la planchette est importante ; l'expérience montre que quand elle est trop mince, le foret traverse le bois sans que suffisamment de sciure se soit amassée. Inversement, si la planchette est trop épaisse, il faudra tourner trop longtemps et attendre que le sommet du tas de sciure rejoigne le point de rotation du foret, là où la chaleur est suffisamment forte pour être efficace.

Remarque 2 : l'angle d'ouverture de l'encoche joue un rôle. Si l'angle de l'encoche est trop fermé il y a risque d'éparpillement quand on veut la dégager car la sciure a tendance à rester coincée

C - La paumelle

Cette pièce sert à appuyer sur l'extrémité supérieure du fuseau maintenu perpendiculaire a la planchette. Nous utilisons un tronçon de métapode de boeuf mais beaucoup d'autres objets pourraient convenir : valve de lamellibranche, pierre plate, bloc de bois dur ou, à l'imitation des eskimos, vertèbre de gros poisson où astragale de cervidés dont la forme est bien adaptée. L'os convient bien : c'est une matière dure et élastique qui se lisse a la friction en facilitant la rotation du foret. Une cupule caractéristique, avec de très fortes traces de carbonisation se forme rapidement au point d'appui.

D - L'archet

Utilisation du foret à arc, position de départ © Photo Jacques Collina-Girard


L'archet doit être assez rigide tout en conservant suffisamment d'élasticité pour permettre de compenser, au doigt, les variations de tension de la corde. Celui que nous utilisons, en bois, a une corde de soixante cinq centimètres. Cette longueur assez grande a l'avantage de limiter le nombre d'allers -et -retours responsables des temps morts dans la rotation du foret (en diminuant la longueur il faudrait accélérer le rythme).

E - La corde

N'importe quelle cordelette résistante convient Si l'on veut faire "authentique" on préférera un lacet de cuir ou du tendon animal.

F - L'utilisation de l'appareil

Anticipons sur le choix des bois convenables en indiquant quelques couples assurant un résultat certain et rapide : peuplier-lierre, tilleul-tilleul, laurier-laurier ou laurier-lierre.



Premiers essais avec le foret à arc © Jacques Collina-Girard


Débordé par la demande, nous avons pris l'habitude pour nos démonstrations grand public d'utiliser le pin (baguette de bois tourné du commerce avec des irrégularités dans l'efficacité car il faut éviter les bâtons trop résineux) frotté contre le lierre. Le résultat est bon mais bien meilleur avec le peuplier (non résineux). Normalement c'est très rapide (une fois acquise la coordination motrice du maniement de l'archet) et l'opération aboutit a une braise dans les 20 secondes. Nous décrirons ici les différents stades de la " chaîne opératoire ".

- Découpe de l'entaille :
Sur le bord de la planchette, en prenant bien soin d'amorcer le foyer en creusant une petite cupule à la pointe du triangle de l'encoche.
- Prise de l'archet :
De la main droite, en enroulant la courroie autour du fuseau. L'enroulement se fait courroie distendue, en maintenant le foret légèrement oblique par rapport a la corde de l'arc. On redresse ensuite le fuseau perpendiculairement au plan de l'archet et de sa corde avec pour résultat de mettre celle ci en tension.

Remarque 1 : Il vaut mieux incliner à 45° sur le foret,le plan archet-corde Si l'on maintient cet angle à 9O°, la corde s'use et casse trop rapidement.

Remarque 2 : l'expérience nous a montré qu'il est commode d'appuyer la partie proximale de l'archet dans le creux de la main, deux ou trois doigts de la main droite placés entre la corde et le bois de l'arc permettent alors de moduler, en cours d'opération la tension de la corde qui, parfois, à tendance à se détendre (nous utilisons deux demi clés pour attacher la corde : "noeud de cabestan").

- Blocage du foret :
La pointe du foret est placée dans le trou amorçage et sa partie supérieure engagée dans la cupule de la paumelle tenue en appui par la main gauche. Le genou droit au sol, le pied gauche maintient bloquée la planchette sur un papier, une écorce,une feuille ou un quelconque support destiné à collecter plus facilement la sciure déversée à la sortie de l'encoche. On pourra ainsi facilement transporter la braise sur une poignée de produit facilement inflammable (paille, herbes sèches ou lichens).

- Mise en mouvement du foret :
Le mouvement de translation à adopter, légèrement plongeant et très régulier, doit être ample pour utiliser toute la longueur de l'archet. Au début, mieux faut opérer calmement et lentement pour assurer l'enfichage de la pointe du foret dans la planchette. Très rapidement de la fumée apparaît le processus étant bien engagé lorsque un peu de sciure carbonisée tombe dans le dièdre de l'encoche. Pour initier le creusement, les aborigènes australiens ajoutaient du sable (mouiller l'extrémité avant de la poser dans le sable) et les tasmaniens utilisaient de la poudre de charbon de bois. Ces astuces techniques sont surtout utiles pour des forets tournés entre les paume des mains où la pression exercée est faible.

Rotation du foret :
Quand la fumée s'épaissit on peut augmenter le rythme quoique sans précipitation. La fumée fugace du début s'étend alors en cachant la pointe du foret. La sciure carbonisée amassée dans l'encoche puis déborde. Une dernière rotation plus accélérée suffit alors à assurer le résultat final.

- Production de sciure :
Il faut attendre que le petit tas de sciure se mette a fumer par lui même pour interrompre la rotation : ce léger filet de fumée montre en effet que le but cherché est atteint.

- Formation et entretien de la braise :
A ce stade, on peut interrompre la friction, soulever le fuseau de la planchette, puis en retirer, sans heurts intempestifs, le pied gauche. Un petit coup sec et précis sur la planchette (avec le foret dégagé de l'archet servant de petit gourdin ) est quelquefois nécessaire pour débloquer sans l'éparpiller le tas de sciure parfois coincé au fond de l'encoche. De cette petite masse de poudre carbonisée s'échappe, si tout s'est bien passé une légère fumée persistante. En éventant très doucement avec les doigts ce filet de fumée, il va s'épaissir et une petite escarbille jusqu'ici invisible va apparaître et se transformer en une braise persistante et utilisable (de dimension équivalente à celle de l'extrémité d'une cigarette). Pour allumer un feu avec cette braise on la posera sur une poignée de paille, d'herbes sèches ou de lichens, creusée en nid et on soufflera doucement .

- A : Percussion pierre et bambou

A Bornéo, d'après des assertions anciennes, on allumait du feu en frappant une variété de bambou avec un tesson de poterie. Ces étonnantes observations ont été récemment confirmées en Papouasie où on a vu allumer du feu par percussion d'un bambou avec une morceau de hache polie : un nouveau défi pour les expérimentateurs (la qualité du bambou utilisé est sans doute importante).

- B : Briquet à air comprimé

Cet instrument, spécifique à l' Asie du sud-est, se compose d'un piston en bois en os ou en corne parfaitement étanche. La compression de l'air contenue dans le corps de pompe produit un échauffement suffisamment important pour enflammer l'amadou fixé au sommet du piston. Ce briquet récemment reproduit en bambou (le corps du piston) et en buis (le piston) fonctionne parfaitement (Boutié et Mannos, 1997). La seule difficulté est de réaliser une étanchéité parfaite (joint de fil de soie et lubrification par du saindoux ou de la vaseline dans ces reproductions expérimentales).

Cet objet inventé dans les laboratoires de physique européens de la fin du XIX° siècle pose un problème d'histoire des techniques. Dans la littérature ethnographique on suggère que ce briquet très particulier à été inventé indépendamment en Asie du sud-est et en Europe. Pour d'autres chercheurs il n'y a pas de preuves formelles que ce briquet existait dans ces régions au XVIII° siècle.

Le débat est donc encore ouvert entre l'hypothèse de la convergence (l'invention indépendante) et celle de la diffusion (copie locale d'un modèle européen).

- Introduction

Faire du feu en percutant un morceau de silex avec de l'acier ne pose pas de problèmes particuliers : le plus simple est de percutant le fil d'un éclat de silex avec un “ briquet ” (lime en acier au carbone reforgée pour lui donner la forme traditionnelle en "coup de poing américain". Faute de mieux on pourra s'en passer en se servant du dos d'une lame de couteau de poche (en acier non inoxydable) et d'utiliser comme produit inflammable un morceau de toile de coton carbonisée.

- Matériel
- Un couteau de poche à lame non inoxydable
- Un vieux chiffon de coton
- Une petite boîte métallique

- Préparation

pour préparer le chiffon carbonisé on placera des morceaux de toile de coton (vieux mouchoir ou autre) dans une petite boîte métallique au couvercle préalablement percé. Placé a feu doux sur une "gazinière" cette ouverture, jouant le rôle d'une petite cheminée, laissera passer un filet de fumée : quand il disparaît c'est prêt ! on laisse refroidir et après ouverture, on trouvera une sorte de "charbon de toile de coton" tout à fait apte a recevoir l'étincelle.

- Action

Il faut frapper tangentiellement le tranchant de l'éclat de silex avec le dos de la lame du couteau : on obtiendra ainsi facilement des gerbes d'étincelles : on pourra s'y entraîner préalablement. L'astuce est de frapper de manière très rasante le tranchant de l'éclat de silex : c'est le tranchant qui arrache des particules d'aciers que le choc enflamme …

On place le chiffon carbonisé au voisinage du point de choc en le maintenant avec le pouce sur le silex : normalement une étincelle va rapidement se planter dans le chiffon qui va alors s'embraser …


Le système le plus efficace est celui du foret a archet … il faut donc commencer par pratiquer ce système. Normalement c'est très rapide (une fois acquise la coordination motrice du maniement de l'archet) et l'opération aboutit a une braise dans les 20 secondes.

La préparation du matériel :

- Le foret

C'est un bâton, de section arrondie dont les deux extrémités sont appointées. Ses dimensions sont très variables. mais ceux que nous utilisons ont une longueur comprise entre vingt et quarante centimètres avec un diamètre compris entre un et deux centimètres. Un foret de petit diamètre tournera plus vite mais développera moins de puissance qu'un foret de fort diamètre. Il s'agira donc de trouver un compromis avantageux (entre un et deux centimètres suivant le bois). La longueur du foret joue aussi un rôle. Cela influe sur le temps d'utilisation car un foret long sert plus longtemps ce qui est commode pour des bois mous qui s'usent très vite. Cette longueur ne peut pas croître indéfiniment car si le foret trop long et trop fin sa rigidité diminue et il vibre de façon gênante. La pratique nous à montré ,de façon empirique, que la longueur optimale avoisine 25 centimètres. En dessous de dix centimètres l'opération est possible mais pénible car il devient très difficile de maintenir le foret en place et de l'empêcher d'être éjecté de la planchette.. L'extrémité supérieure du foret doit être taillée en pointe pour limiter au maximum les forces de frottement. Il faut la retailler de temps en temps, mais pas trop pour qu'elle ne s'écrase pas au contact de la paumelle. Appointer l'extrémité inférieure est aussi important mais pour des raisons exactement inverses car, en début d' installation, la pointe du foret ne doit pas glisser. Par la suite, quand le foret est correctement ajusté dans le trou d'amorçage qui vient de se creuser,les risques de dérapages se réduisent.

- La planchette

On peut prélever cette pièce de bois dans une branche de deux centimètres de diamètre, fendue dans le sens de la longueur ou utiliser une planchette de 1 à 1,5 cm d'épaisseur. L'opération suivante consiste à découper une encoche triangulaire sur le bord de la planchette (un centimètre à un centimètre et demi de profondeur sur autant de largeur). C'est là que viendra se déverser la sciure qui sera ainsi efficacement aérée Il faut ensuite creuser un tout petit trou à la pointe de l'encoche là où viendra s'appuyer le fuseau qui ne doit ni glisser, ni déraper, ce qui peut arriver en début de rotation. L'ajustement forcé du fuseau sur la planchette réduit ensuite de plus en plus ce risque.

Remarque 1 : l'épaisseur de la planchette est importante ; l'expérience montre que quand elle est trop mince, le foret traverse le bois sans que suffisamment de sciure se soit amassée. Inversement, si la planchette est trop épaisse, il faudra tourner trop longtemps et attendre que le sommet du tas de sciure rejoigne le point de rotation du foret, là où la chaleur est suffisamment forte pour être efficace.

Remarque 2 : l'angle d'ouverture de l'encoche joue un rôle. Si l'angle de l'encoche est trop fermé il y a risque d'éparpillement quand on veut la dégager car la sciure a tendance à rester coincée.

- Choix des bois

Certains bois assurent un résultat certain et rapide : peuplier-lierre , tilleul-tilleul , laurier-laurier ou laurier-lierre. A défaut le tourillon des magasins de bricolage (pin) fonctionne mais avec des résultats plus irréguliers frotté contre le lierre. Le résultat est bon mais bien meilleur avec le peuplier (non résineux) .

- La paumelle

Cette pièce sert à appuyer sur l'extrémité supérieure du fuseau maintenu perpendiculaire a la planchette. Nous utilisons un tronçon de métapode de boeuf. mais beaucoup d'autres objets pourraient convenir : coquillage, pierre plate, bloc de bois dur ou, à l'imitation des eskimos, vertèbre de gros poisson où "osselet" dont la forme est bien adaptée.

- L'archet

L'archet doit être assez rigide tout en conservant suffisamment d'élasticité pour permettre de compenser, au doigt, les variations de tension de la corde. Celui que nous utilisons, en bois, a une corde de soixante cinq centimètres. Cette longueur assez grande a l'avantage de limiter le nombre d'allers -et -retours responsables des temps morts dans la rotation du foret (en diminuant la longueur il faudrait accélérer le rythme).

- La corde

N'importe quelle cordelette résistante convient Si l'on veut faire "authentique" on préférera un lacet de cuir ou du tendon animal.

- Action

Assurer l'enfichage du foret sur la planchette
Sur le bord de la planchette, en prenant bien soin d'amorcer le foyer en creusant une petite cupule à la pointe du triangle de l'encoche.
Tenue de l'archet
En tenant l'archet de la main droite on enroule avec la main gauche la courroie autour du fuseau. L'enroulement se fait courroie distendue, en maintenant le foret légèrement oblique par rapport a la corde de l'arc. On redresse ensuite le fuseau perpendiculairement au plan de l'archet et de sa corde avec pour résultat de mettre celle ci en tension.
Remarque 1 : Il vaut mieux incliner à 45° sur le foret,le plan archet-corde Si l'on maintient cet angle à 90°,la corde s'use et casse trop rapidement.
Remarque 2 : l'expérience nous a montré qu'il est commode d'appuyer la partie proximale de l'archet dans le creux de la main, deux ou trois doigts de la main droite placés entre la corde et le bois de l'arc permettent alors de moduler, en cours d'opération la tension de la corde qui, parfois, à tendance à se détendre (nous utilisons deux demi clés pour attacher la corde : "noeud de cabestan").

Positions à adopter

La pointe du foret est placée dans le trou amorçage et sa partie supérieure engagée dans la cupule de la paumelle tenue en appui par la main gauche. Le genou droit au sol, le pied gauche maintient bloquée la planchette sur un papier, une écorce,une feuille ou un quelconque support destiné à collecter plus facilement la sciure déversée à la sortie de l'encoche. On pourra ainsi facilement transporter la braise sur une poignée de produit facilement inflammable (paille, herbes sèches ou lichens).

Mise en rotation du foret

Le mouvement de translation à adopter, légèrement plongeant et très régulier, doit être ample pour utiliser toute la longueur de l'archet. Au début, mieux faut opérer calmement et lentement pour assurer l'enfichage de la pointe du foret dans la planchette. Très rapidement de la fumée apparaît le processus étant bien engagé lorsque un peu de sciure carbonisée tombe dans le dièdre de l'encoche. Quand la fumée s'épaissit on peut augmenter le rythme quoique sans précipitation. La fumée fugace du début s'étend alors en cachant la pointe du foret. La sciure carbonisée amassée dans l'encoche déborde. Une dernière rotation plus accélérée suffit alors à assurer le résultat final. Il faut attendre que le petit tas de sciure se mette a fumer par lui même pour interrompre la rotation : ce léger filet de fumée montre en effet que le but cherché est atteint.

Maintenir et entretenir la braise.

A ce stade, on peut interrompre la friction, soulever le fuseau de la planchette, puis en retirer, sans heurts intempestifs, le pied gauche. Un petit coup sec et précis sur la planchette (avec le foret dégagé de l'archet servant de petit gourdin ) est quelquefois nécessaire pour débloquer sans l'éparpiller le tas de sciure parfois coincé au fond de l'encoche. De cette petite masse de poudre carbonisée s'échappe, si tout s'est bien passé une légère fumée persistante. En éventant très doucement avec les doigts ce filet de fumée, il va s'épaissir et une petite escarbille jusqu'ici invisible va apparaître et se transformer en une braise persistante et utilisable (de dimension équivalente à celle de l'extrémité d'une cigarette). Pour allumer un feu avec cette braise on la posera sur une poignée de paille, d'herbes sèches ou de lichens, creusée en nid et on soufflera doucement .

Les étincelles sont moins impressionnantes qu'avec l'acier mais avec un peu d'entrainement cela fonctionne tout aussi bien !

- Matériel

1.une boule de marcassite. Dans certaines régions ces boules de marcassites sont faciles a trouver (craie de normandie ou de Champagne). Il est parfois plus simple de l'acheter chez un marchand de minéraux.

2.un éclat de silex ou un autre morceau de marcassite pour frapper le premier.

3.De l'amadou, champignon fréquent dans la nature (c'est un champignon parasite en forme de sabot de cheval). Il faut prélever la partie pelucheuse orange que l'on trouve a l'intérieur après l'avoir fenu au couteau.

Production du feu grace à de la marcassite © Photo B. Roussel)

- Action

L'éclat de silex tenu de la main droite percute la boule de marcassite, fendue par le milieu et posée dans la main gauche. Un doigt bloque l'amadou a proximité du point de choc et des étincelles. il faut soigneusement préparer le champignon qu'il faut gratter, pour l'effilocher, avec le tranchant d'un couteau. Il faut ensuite placer convenablement cet amadou, en le tenant avec le doigt, sous la surface de choc et sur la trajectoire des étincelles. Si l'on est précis dans le geste, on arrive, sans grandes difficultés au bout de quelques essais, à loger une petite particule incandescente dans le fragment cotonneux. l'ignition, le plus gagne rapidement toute la masse de l'amadou. Par inclination personnelle, nous préférons actuellement utiliser deux rognons de marcassites en retrouvant le procédé fuégien décrits par Darwin (deux marcassites et un champignon). Le silex trop dur a, en effet, trop tendance à éclater trop vite la pyrite .

Egger Ph.